une "folie" tolédane

Nous entrons ici dans une zone de bizarreries, de dérèglements. Là, il convient de se débarrasser de tout espoir de clarté et d'évidence, la raison devient passion, la méthode se dissipe, l'assentiment musarde entre étonnement et dévotion. Il y a des escapades extravagantes que l'on fait au détour d'une image, d'un écrit,  d'une virgule posée là, qui nous font respirer plus loin et nous projettent au delà des nuages. Voici l'une de ces trouées d'azur, nous sommes entre 1612 et 1614 dans la demeure d'un exilé, peintre, philosophe, sculpteur, architecte. C'est là qu'il a peint ses plus grands chefs d'oeuvre et "c'est dans son atelier dont il a tiré les rideaux noirs qu'il a fini par crucufier Tolède"

Est-ce son enfance sur ce cailloux de la mer Égée qui l'a rendu si sauvage, si intense ? A près de Soixante dix ans, il a  toujours ce désir de la différence. Il  peint comme personne, son travail est empli de feu, de ces flammes sublimes qui vous poussent froidement vers l'abîme. Il étire un peu plus les corps qui chutent ou se dressent comme les danseurs d'un désordre savamment organisé. De ce chaos de formes et de couleurs naît un espace plié/déplié, déchiré, comme épouvanté de ce qu'il sait. Alors dans ces plissements, il loge son rêve, son langage. On entend le chuchotement sourd des adorateurs extatiques, tout autant que le silence gêné des sceptiques effarés. Il s'appelle Doménico Théotokopoulos et j'ai mis mes pas dans ses pas.